On pourrait croire que Mgr Lefebvre n’a pas hésité une seconde pour déterminer le mode de formation des prêtres dans la tourmente conciliaire. Allait-il reprendre ce qu’il avait connu à Rome du temps de Pie XI ou des séminaires spiritains de la brousse et celui de Mortain d’après guerre ? Ou alors faire des séminaires isolés et/ou clandestins ? Mgr Lefebvre va hésiter pendant quelques temps mais il tranche finalement en faveur d’un séminaire classique (selon les désirs du concile de Trente) pour donner aux séminaristes une formation la plus solide et complète possible :
Mgr Lefebvre le 10 octobre 1977 :
[….] «
Alors il fallait choisir. Évidemment c’était une décision grave : est-ce qu’on arrête, est-ce qu’on cesse ou est-ce que l’on continue ? Et bien, j’avoue que je suis étonné moi-même de ne pas avoir eu d’hésitations. Quelquefois, en revenant en arrière, je me dis : – Comment ai-je pu traverser cette période sans avoir d’hésitations, c’est-à-dire sans avoir un désir d’arrêter ?
Mais, voilà, une petite hésitation au sujet de la manière dont il fallait continuer. Est-ce qu’il faudrait constituer des groupes plus petits de séminaristes qui continueraient leurs études et puis en les visitant, continuant le séminaire d’une manière un peu plus clandestine. Et bien, après une réunion que nous avons faite avec les professeurs, on s’est dit : – Non, ce n’est pas possible, ce serait la mort du séminaire, donc c’est inutile. Ou on continue, ou on ne continue pas, mais on ne peut pas continuer d’une manière qui soit dispersée, ça rendra très difficiles les études, ça rendra très difficile la persévérance des séminaristes, le recrutement et tout ça… Non, ce n’est pas possible. Il faut donc continuer tout simplement comme on l’a fait. Je crois que ça a été en effet la bonne solution, la solution qu’a voulue la Providence. Car je crois sincèrement que le séminaire était nécessaire pour beaucoup de choses. Pas seulement pour la formation des prêtres. Je crois que le séminaire a été, et est toujours je l’espère, grâce à Dieu, un témoin du passé, et un témoin de ce qu’est l’Église, de ce que doit être l’Église. C’est un témoin. Et ce témoin a déjà eu des résultats considérables. Je n’y suis pour rien, moi, non vraiment, parce que c’est le séminaire, c’est l’œuvre qui continue qui, par le fait de sa continuité, par le fait de sa fermeté dans la doctrine, de sa fermeté dans la foi, de ce maintien de la Tradition, a eu un impact énorme. » […]
C’est aussi dans cette perspective que les évêques de la Fidélité encouragent le séminaire Saint Louis-Marie Grignion. La raison principale tient dans la disposition d’un corps professoral le plus compétent et complet possible. On sait que Mgr Lefebvre eut toutes les peines du monde à le constituer et à le conserver en raison des crises libérales ou sédévacantistes et c’est une épreuve que ne connaît pas le séminaire St Louis-Marie puisque la stabilité et le sérieux du corps professoral est assuré par les pères dominicains. Le séminaire St Louis-Marie a cependant ses croix : il n’a pas, pour le moment, des bâtiments qui lui permettraient de vivre plus à l’aise : c’est sans doute l’épreuve imposée par la Providence pour avoir de futurs prêtres qui n’auront pas connu le confort bourgeois de certains séminaires de la fsspx.
P.R.